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Actu Radicale
27 novembre 2006

Discours de Jean-Michel Baylet à la Mutualité, congrès d'investiture du 26/11

Jean-Michel Baylet

Chers amis socialistes, mes chers amis radicaux, les circonstances politiques qui nous réunissent aujourd’hui sont véritablement exceptionnelles. Elles sont, disons, hors du commun. Et je tiens à remercier François Hollande, le Premier secrétaire du Parti socialiste, d’avoir créé les conditions pour qu’il en soit ainsi.

Aussi, François, te dire que nous apprécions la qualité des relations qui ont été instituées entre socialistes et radicaux, et surtout la confiance qui préside à ces relations. Radicaux et socialistes ont certes une longue, ancienne tradition d’alliance et même d’amitié, mais notre réunion ici, ce matin, constitue plus qu’une ambition, elle est une étape, une étape d’un vaste mouvement social qui intéresse, nous le devinions, nous le sentions, et désormais nous l’entendons, qui intéresse tous nos concitoyens. Dès notre congrès, voici un mois, nous avions décidé de soutenir au premier tour un candidat commun. Et hier, au comité directeur, le Parti radical de gauche a investi Ségolène Royal comme sa candidate.

D’ailleurs, c’était avec quelque fierté que ce vote a eu lieu à la quasi-unanimité. Mais je suis obligé de reconnaître qu’à cette quasi-unanimité il manquait trois voix. Et quand j’ai vu ce matin votre vote, alors lui vraiment unanime, je me suis dit : « Finalement, mon effet est raté. » Bon, constatons ensemble que finalement les radicaux ne sont pas plus « royalistes » que les socialistes, et c’est peut-être bien ainsi, par respect pour vous !

En tout cas, les radicaux t’ont entendue, Ségolène. S’ils ont décidé d’apporter au grand mouvement qui se dessine la caution de l’humanisme républicain, de la laïcité moderne et exigeante, du solidarisme plus indispensable que jamais, c’est qu’ils se sont reconnus dans un discours qui s’adresse d’abord aux citoyens avant de se diriger vers nos institutions partisanes. Ils ont d’abord, les radicaux, constaté que dans un processus d’échange et d’enrichissement mutuel permanent, la population de ce pays et Ségolène exprimaient la même demande, puissante, profonde, impérative, de changement des méthodes de l’action politique.

Cette lame de fond, qui s’appelle tout simplement rénovation, n’avait trouvé jusque-là à se manifester que de façon négative : avril 2002, mai 2005, l’abstention, les votes extrêmes, les symptômes s’accumulaient d’un rejet de plus en plus fort d’une pratique politique lointaine, hautaine, arrogante et quelquefois méprisante, qu’elle soit d’ailleurs nationale ou européenne.

Car, chers amis, nos concitoyens n’avaient pas dit non à l’Europe, et encore moins non à la gauche. Ils avaient dit tout simplement leur refus d’un pouvoir distant, opaque, aussi pétri de certitudes qu’inopérant devant les interrogations des plus modestes. Et ils refusaient surtout le cynisme de ceux qui regardent le pouvoir comme un simple objectif en soi, les alternances sans alternative, la permanence des puissants qui insultent la précarité des plus désemparés.

Alors, je le dis tout net : quoi qu’il advienne demain, et je suis certain que le meilleur viendra, nous devons d’abord dire merci à Ségolène pour avoir porté le débat sur cette exigence de changement car, dans tous les cas, en politique française, après cette campagne, rien ne sera plus comme avant.

Et les radicaux ont été attentifs, très attentifs même, aux formes que pourrait prendre ce changement. Notre candidate commune a parlé souvent, et encore ce matin, de révolution démocratique. Il ne s’agit pas d’un simple paradoxe ou d’une contradiction séduisante, c’est bien une révolution que nous attendons : révolution institutionnelle avec la relance du grand projet d’Europe fédérale et avec le chantier enfin ouvert de la VIe République ; révolution sociale avec une conception nouvelle du travail, des devoirs des partenaires sociaux, du rôle des collectivités publiques, et surtout avec une politique clairement placée en surplus de l’économie et de la technique, à ce moment-là au service des hommes ; révolution, enfin, de la percée écologique avec l’intégration du facteur environnemental dans l’évaluation de toutes les actions de développement, qu’elles soient publiques ou privées.

Mes chers amis, cette révolution sera démocratique car elle sera, et Ségolène l’a rappelé encore ce matin, conduite par et pour les citoyens eux-mêmes. Nous avons réalisé, grâce à François Mitterrand, voici déjà près d’un quart de siècle, la décentralisation administrative. Mais à quoi sert donc de rapprocher le pouvoir des citoyens si ce n’est pour le leur restituer chaque fois qu’il est possible !

Et le mouvement initié comporte une puissante nouveauté : le cœur administratif de l’État n’est plus seul dépositaire de l’intérêt général. Ce pays est riche de toutes les collectivités territoriales, de ses associations, de ses mutuelles, et ne l’oublions pas non plus, de ses entreprises qui savent aussi se préoccuper du bien public. Plus près des gens, soucieuse de leur conférer ce point de contrôle cher au philosophe radical Alain, confiante en des citoyens qu’un vigoureux effort de formation et d’information aura rendus plus aptes encore à évaluer notre action, la politique française sera enfin modernisée en profondeur.

Oui, nous avons confiance dans le peuple de ce pays et nous savons qu’il aspire à dépasser la somme des intérêts individuels pour se transcender dans de grandes aventures collectives. Encore y faudra-t-il une volonté. Et c’est peut-être le trait le plus marquant de la démarche aujourd’hui engagée : Ségolène a réhabilité dans chacun de ses discours le volontarisme politique, car nous en avions assez de l’inventaire permanent des contraintes prétendument indépassables, assez de la litanie des raisons de ne rien faire, assez de la dictature des conjoncturistes de l’OCDE, assez du gouvernement par une économie à courte vue, oui assez ! Et nous attendions qu’un homme ou une femme se lève enfin pour proposer à une génération entière un nouvel horizon militant, pour dire que rien n’est impossible quand on est déterminé, pour rappeler que le meilleur de la politique, c’est d’inscrire le rêve dans la réalité.

Oserais-je dire que nous avions envie, une fois de plus, de changer la vie. À mille lieux des résignations savantes et satisfaites, des impuissances théorisées, de la délégation de pouvoir consentie aux comptables et aux banquiers, il faut dire aux Français : « Tout cela est à vous, chacun d’entre vous a sa place avec ses moyens. Fort de la confiance de ses élus, chacun peut contribuer à transformer la réalité sociale. »

Il n’y a pas de fatalité du déclin. Rien d’inéluctable dans la précarité ou la pauvreté. Rien d’inévitable dans le chômage ou les inégalités. Il n’y a surtout rien d’acceptable pour un républicain quand c’est la République elle-même qui manque à ses principes. Et merci, Ségolène, d’avoir osé déjà inverser cette tendance au désengagement des politiques et d’avoir préféré la volonté des hommes à l’omnipotence des marchés.

C’est peut-être d’ailleurs dans cette faculté, que j’ai cru comprendre que certains trouvaient ingénue, voire frivole, dans cette faculté de s’insurger contre les évidences postulées, que notre candidate a rendu le plus grand service à la politique. Et on me permettra encore de citer François Mitterrand : « Là où il y a une volonté, il y a un chemin. »

Et cette volonté, chers amis, va nous être demain très nécessaire pour battre la droite. La droite qui use de l’insécurité jusqu’à l’alimenter, tu l’as dit ce matin, comme un argument électoral. La droite qui regarde le chômage non comme un problème mais comme une solution. La droite qui a marginalisé des pans entiers de la société sans plus aucun lien de civisme entre les individus et les institutions. La droite qui voudrait démanteler la solidarité au prétexte de l’efficacité. La droite qui regarde la majorité des Français comme des sujets, des assujettis, des contribuables, des consommateurs, mais jamais comme des citoyens. La droite enfin, résignée à l’affaiblissement de la France dans le monde. Et cela a été aussi rappelé ce matin par nos amis européens, que je tiens à saluer à mon tour. Précisément parce que la droite méprise chez nous les valeurs de l’universalisme qui ont fait le rayonnement de notre pays. Car il ne s’agit pas de conquérir le pouvoir au profit de nos partis, de nos élus ou même de nos adhérents. Nous avons un devoir, je dis bien un devoir, de rendre ce pays aux hommes et aux femmes qui le font vivre.

Alors aujourd’hui, chers amis, radicaux et socialistes, nous sommes rassemblés pour appuyer en le démultipliant, sans jamais l’entraver, le grand projet de notre candidate. Réconcilier les Français avec la politique dans une foi renouvelée en un avenir meilleur et accessible.

Que notre réunion de ce jour, je le souhaite de tout mon cœur, et j’en appelle d’ailleurs à celles et à ceux qui ne sont pas aujourd’hui présents dans cette salle, mais qui, je l’espère, demain seront à nos côtés, que cette réunion soit le prélude à un rassemblement plus vaste de toutes les forces de gauche, bien sûr, mais aussi de tous les hommes de progrès, de toutes les femmes et les hommes de bonne volonté, tous ceux, innombrables, qui sont épris de liberté, de justice et de fraternité et qui viendront, je n’en doute pas, nous rejoindre. Et ils ont déjà commencé largement à le faire.

Je le dis très fortement : nous n’avons pas le droit de décevoir cet espoir. Il y a dans ce puissant mouvement quelques mystères que je qualifierai de métapolitiques, comment le dire autrement ? Ce que nous avons commencé à voir s’écrire sous nos yeux, d’abord incrédules, c’est vrai, reconnaissons-le, c’est entre le peuple français et toi, Ségolène, une grande histoire d’amour.

Nos concitoyens ont envie de politique. Ils ont envie d’un destin maîtrisé et non subi, d’un pays plus grand, plus fort et plus beau. Ils ont envie de s’aimer pour le meilleur d’eux-mêmes. Aidons-les et nous aurons peut-être écrit demain, ensemble, une des plus belles pages de notre histoire. Nous sommes fiers en tout cas d’être aujourd’hui réunis avec vous, amis socialistes. Nous sommes fiers que Ségolène soit notre candidate. Et au-delà du désir d’avenir et du désir de victoire, évoqué ce matin et que j’avais d’ailleurs évoqué moi-même devant le congrès des radicaux de gauche, nous avons aussi à rendre cette victoire encore plus belle parce que cette victoire sera celle de la République, cette victoire sera celle de la France et, pour ce faire, nous comptons sur toi !

PEL
l'intégralité des interventions est disponible sur le site du PS :
http://hebdo.parti-socialiste.fr/2006/11/26/264/#more-264
http://hebdo.parti-socialiste.fr/2006/11/26/263/

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